Cinquième chant
L'histoire du roi Bharata.
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare
entre le roi Rahugana
et Jada Bharata.
duratyaye dhvany ajaya nivesito
rajas-tamah-sattva-vibhakta-karmadrk
sa esa sartho rtha-parah paribhraman
bhavatavim yati na sarma vindati
Il est très facile de comprendre que la voie de la satisfaction des sens est pavée de difficultés insurmontables. Toutefois, celui qui n'en a pas conscience tombe dans le cycle des morts et des renaissances et doit successivement revêtir quantité de corps différents; l'existence matérielle le plonge ainsi dans la souffrance. Peut-être une personne croit-elle maintenant jouir de la vie en tant qu'Américain, Indien, Anglais ou Allemand, mais dans sa vie prochaine, il lui faudra revêtir un corps appartenant à l'une des huit millions quatre cent mille (8 400 000) espèces. Elle devra immédiatement accepter ce nouveau corps en fonction de son karma; elle sera contrainte d'y entrer, et il ne lui servira à rien de protester. Telles sont les lois intransigeantes de la nature. Du fait qu'elle ignore sa nature éternelle, toute de félicité, l'âme distincte s'attache à des actes matériels sous le charme de maya. Bien qu'elle ne puisse jamais connaître le bonheur en ce monde, elle n'en continue pas moins de peiner laborieusement à cette fin. Voilà ce que l'on appelle maya.
sartham vilumpanti kunayakam balat
gomayavo yatra haranti sarthikam
pramattam avisya yahtoranam vrkah
Dans la forêt se trouvent de nombreux brigands et pillards, ainsi que des chacals et des tigres. Les chacals, qui font entendre leurs bruyants jappements au milieu de la nuit, sont comparés à la femme et aux enfants en ce monde matériel. Les enfants disent: "Papa, je voudrais ceci, donne-le-moi! Ne suis-je pas ton fils chéri?" De son côté, l'épouse dit: "Je suis ta femme chérie ; donne-moi cela, j'en ai maintenant besoin." C'est ainsi que l'on est détroussé par les brigands de la forêt. Celui qui ignore le but de la vie humaine est constamment fourvoyé; ce but consiste à atteindre Visnu (na te viduh svartha gatim hi visnum). Tout le monde travaille dur pour gagner de l'argent, mais personne ne sait que son intérêt véritable réside dans le service de Dieu, la Personne Suprême. Et au lieu de dépenser leur argent durement gagné afin de faire progresser le Mouvement pour la Conscience de Krsna, les gens le dilapident dans les boîtes de nuit, les maisons closes, les débits de boisson, les abattoirs et autres établissements du même acabit. Du fait de ses actes pécheurs, l'être vivant s'enlise de plus en plus dans le processus des transmigrations, qui le contraint à revêtir sans fin un corps après un autre. Ainsi plongé dans une situation lamentable, jamais il ne connaît le bonheur.
kathora-damsair masakair upadrutah
kvacit tu gandharva-puram prapasyati
kvacit kvacic casu-rayolmuka-graham
Le foyer matériel est en fait un gouffre d'actions intéressées. Pour subvenir à ses besoins, l'homme se lance dans diverses activités commerciales et industrielles, alors que certains accomplissent de grands sacrifices en vue d'atteindre les systèmes planétaires supérieurs. Mais d'une façon générale, tout le monde est occupé à gagner sa vie en exerçant une profession ou en se livrant à une occupation quelconque. Dans le cours de ces activités, l'homme en vient à rencontrer bien des personnes indésirables, et leur comportement est comparable à des piqûres de moustiques, ce qui crée des conditions de vie pour le moins désagréables. Pourtant, même au coeur de ces tourments, il s'imagine qu'il va construire une grande demeure pour y vivre de façon permanente, tout en sachant que c'est là chose impossible. L'or est comparé à une sorte de démon apparaissant à la façon d'un météore dans le ciel: visible un moment, il disparaît l'instant d'après. Les karmis sont généralement attirés par l'or ou l'argent,(1) mais notre verset compare ces richesses à des spectres et à des sorcières.
(1) Il ne s'agit pas ici du métal mais de l'argent en général.
tatas tato dhavati bho atavyam
kvacic ca vatyotthita-pamsu-dhumra
diso na janati rajas-valaksah
Les Ecritures enseignent que l'attrait exercé par le foyer repose sur la femme, car la vie sexuelle représente le centre de la vie familiale: yan maithunadi-grhamedhi-sukham hi tuccham. Le matérialiste, mettant sa femme au centre de ses intérêts, ne cesse de travailler jour et nuit. Son seul plaisir dans la vie, c'est d'avoir des rapports sexuels; voilà pourquoi les karmis s'attachent aux femmes en tant qu'amies ou épouses. A dire vrai, ils ne pourraient pas travailler si on les privait de plaisirs sexuels. La femme est comparée à un tourbillon de vent, particulièrement au cours de ses règles. Ceux qui observent rigoureusement les principes régissant la vie de famille n'ont de rapports sexuels qu'une fois par mois, à la fin des règles; et tandis que l'homme envisage cette perspective, il est charmé par la beauté de sa femme -d'où l'image du tourbillon de vent recouvrant ses yeux de poussière. Ceux qu'anime une telle concupiscence ignorent que différents devas observent tous leurs agissements matériels particulièrement le deva du Soleil, et les portent au compte du karma de leur prochain corps. Les calculs astrologiques forment ce qu'on appelle le jyoti-sastra. C'est parce que le jyoti, ou la lumière de ce monde, vient des diverses étoiles et planètes que cette branche du savoir a pour nom jyoti-sastra, ou "science des luminaires". Les calculs portant sur le jyoti permettent de déterminer notre avenir, ce qui revient à dire que tous les luminaires -les étoiles, le Soleil et la Lune- sont témoins des activités de l'âme conditionnée. C'est ainsi que chacun reçoit un type de corps particulier. Un être concupiscent dont la vision est voilée par la poussière soulevée par le tourbillon de vent de l'existence matérielle ne considère nullement que les différentes étoiles et planètes observent ses actions et le reportent sur son compte. Ignorant cette vérité, l'âme conditionnée se livre à toutes sortes d'actes répréhensibles pour satisfaire sa concupiscence.
uluka-vagbhir vyathitantaratma
apunya-vrksan srayate ksudhardito
marici-toyany abhidhavati kvacit
parasparam calasate nirandhah
asadya davam kvacid agni-tapto
nirvidyate kva ca yaksair hrtasuh
Lorsqu'on est accablé par la chaleur ardente du soleil, on plonge parfois dans une rivière pour se rafraîchir; cependant, si celle-ci est presque asséchée, on risque de se rompre les os. L'être conditionné se trouve ainsi constamment confronté à diverses conditions misérables. Parfois, ses efforts pour obtenir de l'aide de certains amis ne valent guère mieux que de plonger dans une rivière asséchée; il n'en tire aucun bénéfice et ne réussit qu'à se rompre les os. Parfois encore, souffrant d'un manque de nourriture, il en vient à requérir l'assistance d'une personne qui n'est ni en mesure de faire la charité ni disposée à la faire. Et lorsqu'il est ancré dans la vie de famille, il est comme entouré d'un incendie de forêt (samsara-davanala-lidha-loka). Lorsque le gouvernement l'écrase d'impôts, il se désespère. Les impôts excessifs l'obligent à camoufler ses véritables revenus; mais en dépit de ses efforts, les agents du gouvernement sont en général si vigilants et si habiles qu'ils finissent de toute façon par s'emparer de son argent, ce qui le remplit d'amertume.
Les gens cherchent donc le bonheur en ce monde, mais c'est comme s'ils cherchaient à être heureux au coeur d'un incendie de forêt. Ce genre de sinistre se déclare tout seul, sans que personne n'ait besoin d'allumer un feu; de même, personne ne veut être malheureux dans sa vie familiale ou sociale, mais les lois de la nature imposent le malheur et la souffrance à tous les êtres. Il est très dégradant d'avoir à dépendre d'une autre personne pour vivre; c'est pourquoi, selon la culture védique, chacun devrait vivre de façon autonome. Seuls les sudras en sont incapables; ils doivent servir quelqu'un pour assurer leur subsistance. Or, les sastras nous disent: kalau sudra sambhavah. Dans l'âge de Kali, chacun dépend de la miséricorde d'un autre pour sa subsistance, de telle sorte que tout le monde appartient à la classe des sudras. Le douzième Chant du Srimad-Bhagavatam déclare en outre que, dans le Kali-yuga, les gouvernements prélèveront des impôts sans rendre aux citoyens des services proportionnels. Anavrstya vinanksyanti durbhiksa-kara- piditah. En outre, la pluie viendra à manquer, et la nourriture se fera ainsi de plus en plus rare, alors que les gens seront écrasés sous le poids des impôts gouvernementaux. Ils renonceront alors à mener une existence paisible, et ils quitteront leurs foyers et leurs terres pour se rendre dans la forêt, tous leurs espoirs déçus.
socan vimuhyann upayati kasmalam
kvacic ca gandharva-puram pravistah
pramodate nirvrtavan muhurtam
Ici, les mots gandharva-puram sont riches de sens. Il arrive parfois qu'on voie apparaître un immense palais au coeur de la forêt, mais ce genre de vision n'est qu'un fantasme, car en fait ce palais n'existe nulle part ailleurs que dans l'imagination. C'est ce qu'expriment les mots gandharva-pura. Dans la forêt matérielle, l'être conditionné se prend parfois à contempler de grands châteaux ou des gratte-ciel où il aimerait vivre à jamais dans la paix en compagnie de sa famille, mais il ne fait que gaspiller son énergie; les lois de la nature ne permettent pas la réalisation de ce rêve. Lorsqu'il parvient à pénétrer dans ces palais et à s'y installer, il pense pour un temps y être très lie heureux, bien que son bonheur soit voué à prendre fin un jour. Ce bonheur peut durer quelques années, mais étant donné que le propriétaire du château doit le quitter à l'heure de sa propre mort, tous ses rêves s'écroulent en fin de compte. Ainsi vont les choses en ce monde... Srila Vidyapati décrit ce bonheur comme celui que procure la vue d'une goutte d'eau dans le désert. Le soleil y fait régner une chaleur torride, et pour en abaisser la température, il faudrait des quantités d'eau phénoménales, des millions et des millions de litres! Quel effet pourrait bien avoir une seule goutte d'eau? Certes, l'eau a de la valeur, mais une goutte à elle seule ne peut réduire la chaleur du désert. Chaque être se montre ambitieux dans le désert de ce monde, mais la chaleur y est très accablante; de quel secours alors nous sera un fantasme? Aussi, Srila Vidyapati chante-t-il: tatala saikate, vari-bindu-sama, suta-mita-ramani-samaje -le bonheur que procurent la vie de famille, l'amitié et les liens sociaux ressemble à une goutte d'eau dans le désert brûlant. L'univers matériel tout entier s'efforce de trouver le bonheur, car il est la prérogative de l'être vivant. Malheureusement, pour être entré en contact avec la matière, celui-ci en est réduit à lutter pour sa subsistance. Même si l'on est heureux pendant un certain temps, un puissant ennemi risque toujours de venir nous dérober tout ce que nous avons. Bien des exemples nous montrent de riches hommes d'affaires qui, du jour au lendemain, se sont trouvés à la rue, réduits à la plus extrême pauvreté. Néanmoins, du fait de la nature de l'existence matérielle, les sots se laissent fasciner par les mouvements qui lui sont liés et oublient le but véritable de l'existence: la réalisation spirituelle.
nagaruruksur vimana ivaste
pade pade bhyantara-vahninarditah
kautumbikah krudhyati vai janaya
Ambitieux, l'être conditionné voudrait vivre très heureux ici-bas auprès famille de sa famille, mais il est comparé à un voyageur qui désire gravir une montagne dont le sol est jonché d'épines et de petits cailloux. Comme l'indiquait le verset précédent, le bonheur qui découle des rapports sociaux, de l'amitié et de l'amour de ce monde, ressemble à une goutte d'eau dans la chaleur torride du désert. Vouloir acquérir puissance et prestige dans la société revient à tenter d'escalader une montagne jonchée d'épines. Srila Visvanatha Cakravarti Thakura compare la famille à de hautes montagnes; chercher le bonheur auprès de ses proches peut être comparé à l'effort d'un homme affamé essayant de gravir une montagne dont le sol est parsemé d'épines. 99,9% des gens pour ainsi dire sont malheureux au sein de la vie familiale, en dépit de tous leurs efforts pour satisfaire les membres de leur famille. Dans les pays d'Occident, l'insatisfaction est si grande qu'il n'y a pour ainsi dire pas de vie de famille. On compte de nombreux cas de divorce, et les enfants, eux-même frustrés, renoncent à la protection de leurs parents et quittent le foyer. Dans l'âge de Kali tout particulièrement, la vie de famille proprement dite est de plus en plus réduite. On y devient de plus en plus égocentrique, ainsi le veut la loi de la nature. Même si l'on a suffisamment d'argent pour pourvoir aux besoins des siens, la situation est telle que personne n'est plus heureux en famille. Voilà pourquoi, selon l'institution du varnasrama, il faut se retirer de la vie familiale une fois passée la moitié de sa vie: pancasordhvam vanam vrajet; on doit de son plein gré renoncer à la vie de famille vers la cinquantaine pour se rendre à Vrndavana ou dans la forêt. Srila Prahlada Maharaja le recommande lui-même
:
sada samudvigna-dhiyam asad-grahat
hitvatma-patam grham andha-kupam
vanam gato yad dharim asrayeta
(S.B.,7.5.5)
navaiti kincid vipine paviddhah
dastah sma sete kva ca danda-sukair
andho ndha-kupe patitas tamisre
Si quelqu'un perd conscience après avoir été mordu par un serpent, il perd en même temps tout moyen de comprendre ce qui se passe en dehors de son corps. Cette condition est comparable à celle du sommeil profond. Or, l'âme conditionnée se trouve ainsi endormie dans le sein de l'énergie d'illusion. Bhaktivinoda Thakura chante: kata nidra yao maya-pisacira kole -''Ame endormie, jusqu'à quand sommeilleras-tu ainsi dans les bras de l'énergie d'illusion?'' Les gens ne comprennent pas qu'en fait ils dorment en ce monde matériel, dénués de toute connaissance de la vie spirituelle. C'est pourquoi Caitanya Mahaprabhu dit:
hari-nama-maha-mantra lao tumi magi
''J'ai apporté le remède au sommeil perpétuel dans lequel sont plongés tous les êtres. Acceptez, je vous en prie, le Saint Nom du Seigneur, le maha-mantra Hare Krsna, et réveillez-vous." La Katha Upanisad (1.3.14) dit de son côté: uttistha jagrata prapya yaran nibodhata -"O âmes conditionnées, vous dormez en ce monde; réveillez-vous, et tirez parti de votre existence humaine.'' Le sommeil implique la perte de toute connaissance. La Bhagavad-gita (II.69) ajoute à cet égard: ya nisa sarva-bhutanam tasyam jagarti samryami. "Ce qui est nuit pour tous les êtres devient, pour l'homme qui s'est rendu maître de ses sens, le temps de l'éveil." Même sur les planètes supérieures, tous subissent le charme de l'énergie d'illusion. Personne ne s'y montre vraiment intéressé par les valeurs réelles de la vie. Le sommeil profond, qui a pour nom kala-sarpa (le facteur temps), maintient l'âme conditionnée dans l'ignorance, de telle sorte que sa conscience pure est perdue. Il y a de nombreux trous profonds dans la forêt, et si quelqu'un tombe dans l'un d'eux, il n'a aucune chance d'en être tiré. Profondément endormi, il est continuellement mordu par certaines bêtes, et particulièrement par des serpents.
tan-maksikabhir vyathito vimanah
tatrati-krcchrat pratilabdhamano
balad vilumpanty atha tam tato nye
pratikriyam kartum anisa aste
kvacin mitho vipanan yac ca kincid
vidvesam rcchaty uta vitta-sathyat
Les tentatives en vue de repousser les agressions de la nature matérielle constituent un exemple de la lutte pour l'existence. Ces efforts engendrent l'inimitié entre les hommes, si bien que la société est faite de gens envieux et malveillants; telle est la nature du monde matériel. A l'opposé, le Mouvement pour la Conscience de Krsna cherche à créer une atmosphère dépourvue d'envie. Il n'est certes pas possible pour tous de devenir conscients de Krsna, mais le Mouvement pour la Conscience de Krsna peut néanmoins créer une société exemplaire d'où l'envie est bannie.
sayyasana-sthana-vihara-hinah
yacan parad apratilabdha-kamah
parakya-drstir labhate vamanam
La mendicité, l'emprunt et le vol sont le propre de l'univers matériel. Il s'agit en effet des trois activités auxquelles se livrent ceux qui sont dans le besoin. Si l'on n'obtient pas satisfaction en mendiant, on emprunte. Si l'on ne peut payer, on vole, et lorsqu'on se fait prendre, on est alors en butte aux fronts. Telles sont les lois de l'existence matérielle. Nul ne peut vivre ici-bas de façon très honnête; aussi chacun cherche-t-il à satisfaire ses sens par quelque tour ou tromperie, en mendiant, en empruntant ou en volant. Bref, personne ne vit paisiblement en ce monde.
vairanubandho vivahan mithas ca
adhvany amusminn uru-krcchra-vitta-
badhopasargair viharan vipannah
Dans l'univers matériel, sociétés, nations et peuples se livrent à quantité de transactions, mais celles-ci finissent toujours par s'entacher d'inimitié. Pareillement, au sein du mariage, les questions d'argent dégénèrent parfois du fait de la nature dangereuse de l'existence matérielle; il arrive alors qu'on tombe malade ou qu'on soit financièrement gêné. A l'époque actuelle, la plupart des pays sont économiquement développés; toutefois, du fait même des échanges commerciaux, leurs rapports deviennent de plus en plus tendus. Finalement, des guerres éclatent entre nations, semant la destruction partout à travers le monde, et les gens connaissent alors des souffrances terribles.
vihaya jatam parigrhya sarthah
avartate dyapi na kascid atra
viradhvanah param upaiti yogam
La vie de famille dans l'univers matériel est fondée sur les rapports sexuels: yan maithunadi-grhamedhi-sukham. (S.B.,7.9.45) Par l'union charnelle, le père et la mère engendrent des enfants, lesquels se marient et font comme leurs parents. Après la mort de ces derniers, les enfants engendrent leurs propres descendants. Ainsi, de génération en génération, cette histoire se répète sans que personne ne parvienne à se libérer des problèmes l'existence matérielle. Nul ne veut adopter la voie spirituelle du savoir et du renoncement, qui trouve son aboutissement dans le bhakti-yoga. Pourtant, la vie humaine est précisément destinée au jnana et au vairagya, au avoir et au renoncement, au travers desquels on peut accéder au niveau du service de dévotion. Malheureusement, les gens de l'âge où nous vivons évitent la compagnie des âmes libérées (sadhu-sanga) et continuent de suivre la voie stéréotypée de la vie familiale. C'est ainsi qu'ils s'enlisent dans les problèmes causés par l'argent et le sexe.
mameti sarve bhuvi baddha-vairah
mrdhe sayiran na tu tad vrajanti
yan nyasta-dando gata-vairo bhiyati
tad-asrayavyakta-pada-dvija-sprhah
kvacit kadacid dhari-cakratas trasan
sakhyam vidhatte baka-kanka-grdhraih
De nombreux oiseaux et autres bêtes, ainsi que toutes sortes d'arbres, de plantes grimpantes et de lianes peuplent la jungle du monde matériel. L'être vivant aspire parfois au refuge que lui offrent ces lianes, ce qui revient à dire qu'il souhaite trouver le bonheur dans les bras de sa femme, dont l'étreinte est comparable à celle des plantes grimpantes. Dans le feuillage de ces lianes chantent de nombreux oiseaux, et son désir de les entendre signifie qu'il se plait à écouter la douce voix de sa femme. Cependant, quand vient la vieillesse, il lui arrive de se sentir effrayé à la pensée de la mort imminente, qui est comparée au rugissement du lion; et pour échapper au fauve, il cherche refuge auprès de quelque svami, yogi, ou incarnation de pacotille -en fait tous des simulateurs et des escrocs. Ainsi égaré par l'énergie d'illusion, il ruine son existence. Les Ecritures enseignent: harim vina mrtim na taranti. Nul ne peut échapper au danger imminent de la mort à moins de trouver refuge en Dieu, la Personne Suprême. Le mot hari désigne aussi bien le lion que le Seigneur Suprême, et pour échapper à hari, le lion de la mort, il faut chercher refuge en Hari, le Seigneur Suprême. Mais les hommes peu versés dans la connaissance s'en remettent à des abhaktas, lesquels ne sont que des escrocs et des charlatans, afin d'être arrachés aux griffes de la mort. Dans la jungle matérielle, l'être conditionné aspire tout d'abord au plaisir d'être enlacé par les bras de sa femme -semblables à des lianes- et d'entendre sa douce voix. Ensuite, il lui arrive de chercher refuge auprès de prétendus gurus et sadhus, lesquels peuvent être comparés à des grues, des hérons et des vautours. Ainsi, parce qu'il ne se réfugie pas auprès du Seigneur Suprême, il se retrouve doublement trompé.
arocayan silam upaiti vanaran
taj-jati-rasena sunirvrtendriyah
parasparodviksana-vismrtavadhih
Il arrive qu'un être peu intelligent se dégoûte de ses mauvaises fréquentations pour venir vivre avec des bhaktas et des brahmanas, et recevoir finalement l'initiation d'un maître spirituel. Ainsi que le lui recommande son maître spirituel, il s'efforce d'observer les principes régulateurs, mais il s'en montre malheureusement incapable. Il renonce alors à la compagnie des bhaktas pour s'associer à nouveau à des êtres simiesques qui ne s'intéressent qu'aux plaisirs charnels et à l'ivresse. Les soi-disant spiritualistes sont en effet comparés à des singes. Extérieurement, ces derniers ressemblent parfois à des sadhus, car ils vivent nus dans la forêt en cueillant des fruits; mais leur seul désir est de s'entourer de nombreuses femelles pour éprouver des jouissances sexuelles. De prétendus aspirants à la vie spirituelle se lient parfois avec des bhaktas conscients de Krsna, mais ils se montrent incapables de respecter les principes régulateurs ou de suivre la voie spirituelle. Par conséquent, ils quittent la compagnie des bhaktas pour rejoindre les rangs des viveurs, lesquels sont comparables à des singes. Ils ravivent ainsi leurs désirs d'ivresse et de volupté, et se sentent satisfaits lorsqu'ils regardent le visage de ceux qui les entourent. C'est ainsi qu'ils passent le reste de leurs jours, jusqu'à ce que survienne la mort.
vyavaya-dino vivasah sva-bandhane
kvacit pramadad giri-kandare patan
vallim grhitva gaja-bhita asthitah
Ce verset décrit la condition précaire d'un homme marié. La vie familiale abonde en effet en problèmes et en souffrances, et son seul attrait réside dans les rapports sexuels. Mais l'homme se fait alors repousser par sa femme, tout comme l'âne essuie les ruades que lui décoche sa femelle. Du fait de rapports sexuels très fréquents, il devient la proie de nombreux maux incurables. A ce moment-là, effrayé par la mort que l'on compare à un éléphant, il reste pendu aux branches et aux rameaux de son arbre, tout comme un singe.
punas ca sartham pravisaty arindama
adhvany amusminn ajaya nivesito
bhraman jano dyapi na veda kascana
Telle est l'existence matérielle. Une fois prisonnier de l'instinct sexuel, on s'enchaîne de tant de manières qu'on devient incapable de saisir le but véritable de l'existence. C'est pourquoi le Srimad-Bhagavatam (7.5.31) enseigne: na te viduh svartha-gatim hi visnum -la plupart du temps, les gens ne comprennent pas le but ultime de la vie. Comme l'expliquent les Vedas: om tad visnoh paramam padam sada pasyanti surayah -les êtres spirituellement évolués ne s'attachent qu'aux pieds pareils-au-lotus de Visnu. Toutefois, l'âme conditionnée n'étant pas soucieuse de raviver sa relation avec Visnu, elle se laisse ensorceler par les activités d'ordre matériel et s'assujettit par là à un esclavage perpétuel, trompée qu'elle est par de prétendus dirigeants.
sannyasta-dandah krta-bhuta-maitrah
asaj-jitatma hari-sevaya sitam
jnanasim adaya tarati-param
Dans la Bhagavad-gita (XV.3-4), Sri Krsna compare l'univers matériel à un arbre d'illusion dont on doit se détacher:
nanto na cadir na ca sampratistha
asvattham enam suvirudha-mulam
asanga-sastrena drdhena chittva
tatah padam tat parimargitavyam
yasmin gata na nivartanti bhuyah
tam eva cadyam purusam prapadye
yatah pravrttih prasrta purani
"De cet arbre, nul ne peut, en ce monde, percevoir la forme exacte. Nul n'en peut voir la fin, le commencement ni la base. Mais il faut, avec détermination, trancher du glaive du détachement ce banian aux puissantes racines, chercher le lieu d'où, une fois qu'on l'atteint, il n'est pas de retour; puis là, s'abandonner à la Personne Suprême, Dieu, de qui tout a commencé et en qui tout demeure depuis des temps immémoriaux."
aho nr-janmakhila-janma-sobhanam
kim janmabhis tv aparair apy amusmin
na yad dhrsikesa-yasah-krtatmanam
mahatmanam vah pracurah samagamah
Une naissance en tant qu'être humain représente une occasion exceptionnelle de parvenir à la réalisation spirituelle. On peut naître sur un système planétaire supérieur parmi les devas, mais vu les nombreux avantages matériels qu'offre une telle situation, il s'avère impossible d'y échapper à l'esclavage matériel. Même sur cette terre, ceux qui vivent dans l'opulence ne se soucient généralement pas d'adopter la Conscience de Krsna. Un homme intelligent qui désire véritablement être délivré des filets de la matière doit chercher la compagnie de purs bhaktas. A leur contact, il pourra peu à peu se détacher de toute attirance matérielle pour l'argent et les femmes. Cette attirance constitue le principe fondamental de l'attachement matériel. C'est pourquoi Sri Caitanya Mahaprabhu recommanda à tous ceux qui désirent sérieusement retourner dans le monde spirituel de renoncer à ces deux aspects de la vie matérielle, de manière à devenir digne d'entrer dans le royaume de Dieu. L'argent et les femmes peuvent toutefois être entièrement consacrés au service du Seigneur, et celui qui sait agir de cette façon peut être libéré de l'asservissement à la matière. Satam prasangan mama virya-samvido bhavanti hrt-karna-rasayanah kathah: on ne peut goûter la glorification de Dieu, la Personne Suprême, que dans la compagnie des bhaktas. (S.B.,3.25.25) Même un court moment passé au contact d'un pur bhakta peut nous permettre de retourner à Dieu.
hatamhaso bhaktir adhoksaje mala
mauhurtikad yasya samagamac ca me
dustarka-mulo pahato vivekah
La compagnie des purs bhaktas nous affranchit à coup sûr des rets de la matière, ce qu'illustre fort bien la rencontre du roi Rahugana avec Jada Bharata. Le roi Rahugana se trouva immédiatement libéré de tous les doutes et inquiétudes résultant de fréquentations matérielles. Les arguments présentés par un pur bhakta à ses disciples sont si convaincants que même un étudiant à l'esprit lent s'en trouve aussitôt illuminé spirituellement.
namo yuvabhyo nama avatubhyah
ye brahmana gam avadhuta-lingas
caranti tebhyah sivam astu rajnam
Le roi Rahugana se repentait beaucoup d'avoir forcé Jada Bharata à porter ,son palanquin. C'est pourquoi il offre ici des prières à toutes les catégories de brahmanas et d'êtres réalisés, même s'ils ont l'âge de jouer comme des enfants ou s'ils se cachent sous un déguisement quelconque. Les quatre Kumaras, par exemple, allaient partout sous l'apparence de garçonnets de cinq ans, et de même il existe de nombreux brahmanas, connaissant le Brahman, qui parcourent le globe en tant que jeunes hommes, enfants ou avadhutas. Infatués par leur position, les représentants des dynasties royales se rendent généralement coupables d'offenses envers ces grandes personnalités. Aussi le roi Rahugana leur offre-t-il son hommage respectueux, espérant que les dynasties royales coupables de telles offenses ne sombreront pas dans une condition infernale. Nul, s'il offense un être élevé, ne peut être excusé par le Seigneur Souverain, même si la personne en question ne se sent pas offensée. Nous avons l'exemple de Durvasa qui, après avoir offensé Maharaja Ambarisa, alla jusqu'à voir Visnu pour obtenir Son pardon, mais Celui-ci ne put le lui accorder. Il fut donc obligé, en dernier recours, d'aller se jeter aux pieds pareils-au-lotus de Maharaja Ambarisa, bien que celui-ci ne jût qu'un ksatriya-grhastha. Il faut dès lors prendre grand soin de ne pas offenser les pieds pareils-au-lotus des vaisnavas et des brahmanas.
ity evam uttara-matah sa vai brahmarsi-sutah sindhu-pataya atma-
satattvam viganayatah paranubhavah parama-karunikatayopadisya
rahuganena sakarunam abhivandita-carana apurnarnava iva nibhrta-
karanormy-asayo dharanim imam vicacara.
Dans le Srimad-Bhagavatam (3.25.21), Kapiladeva décrit ce qui caractérise les grandes âmes: titiksavah karunikah suhrdah sarva-dehinam -le saint bhakta fait preuve d'une grande tolérance; il est l'ami de tous les êtres et ne se fait aucun ennemi en ce monde. Le pur bhaktasadhu, et Jada Bharata en est un exemple vivant. Parce qu'il avait un corps matériel, ses sens ne manquèrent pas d'être troublés lorsqu'il fut insulté par le roi Rahugana; mais, plus tard, devant l'humble soumission du roi, Jada Bharata lui pardonna. Il est du devoir de toute personne qui désire retourner à Dieu de se montrer soumise comme le roi Rahugana et d'implorer le pardon des vaisnavas qu'elle a pu offenser. Les vaisnavas possèdent généralement une nature très bienveillante; si donc l'on se soumet sans tarder à leurs pieds pareils-au-lotus pour une offense qu'on a pu commettre envers eux, on est aussitôt affranchi des conséquences de celle-ci. En revanche, quiconque n'agit point ainsi devra subir ses répercussions, et celles-ci n'auront rien d'agréable. possède toutes les qualités d'un
avidyadhyaropitam ca dehatma-matim visasarja. evam hi nrpa
bhagavad-asritasritanubhavah.
Ainsi que l'enseigne le Caitanya-caritamrta (Madhya 22.54):
lava-matra sadhu-sange sarva-siddhi haya
Il est indéniable que si l'on cherche refuge auprès d'un pur bhakta, on accède à toute perfection, même si le contact n'est que de courte durée. Un sadhu est un pur dévot du Seigneur. Nous pouvons à ce propos communiquer notre expérience personnelle. La première instruction de notre maître spirituel nous a infusé la conscience de Krsna, si bien que maintenant nous nous trouvons au moins sur la voie de la conscience de Krsna, et à même d'en comprendre la philosophie. Le résultat en est qu'un grand nombre de bhaktas prennent part au Mouvement pour la Conscience de Krsna. Le monde entier est gouverné par une conception matérielle de l'existence, centrée sur le corps; il faut donc qu'il y ait des bhaktas partout à la surface du globe pour libérer les gens de cette conception erronée de l'existence et pour les engager pleinement dans la Conscience de Krsna.
ya ha va iha bahu-vida maha-bhagavata tvayabhihitah paroksena
vacasa jiva-loka-bhavadhva sa hy arya-manisaya kalpita-visayo
nanjasavyutpanna-loka-samadhigamah. atha tad evaitad
duravagamam samavetanukalpena nirdisyatam iti.
Le Srimad-Bhagavatam contient de nombreux récits et incidents symboliques. Ces allégories peuvent ne pas être comprises des hommes de peu d'intelligence; il est donc du devoir de l'étudiant d'aller trouver un maître spirituel authentique pour en obtenir l'explication directe.
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